Des chercheurs luxembourgeois et allemands ont étudié le liquide céphalo-rachidien de patients atteints de la maladie de Parkinson et de personnes en bonne santé afin d'identifier des biomarqueurs permettant un diagnostic précoce de la maladie. Seize métabolites, de petites molécules produites par des réactions chimiques au sein de nos cellules, présentaient des concentrations significativement différentes chez les patients. Ces métabolites peuvent avoir des fonctions biologiques importantes. Les changements observés par les chercheurs dans la composition moléculaire du liquide céphalo-rachidien sont par exemple associés au stress oxydatif, un déséquilibre au niveau des radicaux libres et des antioxydants, impliqué dans diverses maladies chroniques comme le cancer, le diabète ou certains problèmes cardiaques. Il est important de noter que cette étude s'est concentrée sur des patients au stade précoce de la maladie de Parkinson, n'ayant pas encore reçu de traitement médical. Cela dans le but d'identifier des molécules qui pourraient servir de biomarqueurs et permettre de diagnostiquer la maladie plus tôt.
Des méthodes informatiques pour définir une signature moléculaire caractéristique de la maladie
Des échantillons de liquide céphalo-rachidien ont été prélevés par ponction lombaire chez 44 patients atteints de la maladie de Parkinson et 43 participants témoins résidant au Luxembourg et dans la Grande Région. Les composants métaboliques contenus dans ces échantillons ont ensuite été analysés. Au total, 111 molécules différentes ont été identifiées dans les différents échantillons. Connaître la composition des échantillons a permis d’en utiliser une partie pour entraîner un algorithme informatique à identifier une signature moléculaire spécifique de la maladie de Parkinson. Le reste des échantillons a été utilisé pour confirmer la précision de l'algorithme. Tous les échantillons de patients ont de plus été comparés à des échantillons de participants témoins équivalents afin d'exclure tout effet du sexe ou de l'âge sur les résultats.
Dans la maladie de Parkinson, l'apparition des symptômes cliniques - et donc le diagnostic - survient généralement à un stade où une partie importante du cerveau est déjà endommagée. Pouvoir identifier une telle signature moléculaire pourrait donc fournir des informations précieuses pour permettre la détection précoce de la maladie.
Des changements dans les concentrations en métabolites qui affectent les processus cellulaires
Parmi les métabolites identifiés, le niveau d'acide déshydroascorbique, une forme oxydée de la vitamine C qui permet son transport vers le cerveau, était significativement réduit chez les patients. Dans le cerveau, la vitamine C est connue pour protéger les cellules nerveuses contre les radicaux libres qui peuvent les endommager. Or, chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson, les cellules nerveuses dégénèrent prématurément dans une zone spécifique du cerveau. Une carence en acide déshydroascorbique pourrait donc être un indicateur précoce des lésions cellulaires à venir qui mèneront à la maladie de Parkinson.
Les chercheurs ont également détecté une augmentation de l'acide thréonique, un produit de dégradation de la vitamine C, dans le liquide céphalo-rachidien des patients. Le métabolisme de la vitamine C semble donc bien être affecté chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson, ce qui a un impact sur la réponse au stress oxydatif : avec un manque de vitamine C dans le cerveau, la protection contre les radicaux libres ne peut être assurée.
L’augmentation des concentrations en glucose, mannose et fructose observées dans les échantillons de patients vient aussi appuyer ces résultats. En effet, ces trois sucres sont utilisés par nos cellules pour produire de l'énergie rapidement. Lorsqu'une cellule subit un stress oxydatif, elle va décomposer ces molécules de sucre afin de générer de l'énergie. Ce mécanisme permet d'éviter la production de radicaux libres supplémentaires - et donc un stress oxydatif plus important - et de restaurer la viabilité de la cellule.
Validation des résultats dans un groupe indépendant
Afin de confirmer les résultats obtenus et de valider l'algorithme utilisé pour identifier une signature moléculaire de la maladie de Parkinson à un stade précoce, les chercheurs ont analysé des échantillons provenant d'une cohorte de Tübingen, en Allemagne, composée de 24 patients et de 12 témoins en bonne santé. Tous les résultats ont pu être validés dans cet ensemble de données indépendant, confirmant leur exactitude et leur fiabilité. Comme ces résultats sont indépendants de l'âge et du sexe des participants, la signature basée sur les concentrations en acide déshydroascorbique, en acide thréonique et en sucres dans le liquide céphalo-rachidien peut apporter une contribution précieuse à l'amélioration du diagnostic précoce de la maladie de Parkinson.